À la Conquête des Millions de Taiwan avec sa Valise de Projets

À LA CONQUÊTE DES MILLIONS DE TAÏWAN AVEC SA VALISE BOURRÉE DE PROJETS par LJ

  • Jovenel Moïse met ses compétences de vendeur à l’épreuve

Les bailleurs de fonds traditionnels d’Haïti ayant tenu trop longtemps la dragée haute à Jovenel Moïse, il a décidé de tenter ses chances ailleurs. Lui, ses conseillers et proches collaborateurs pensent que la présente réalité diplomatique crée des opportunités en or à Taïwan, qui n’existent nulle part dans le monde. C’est pourquoi, il est parti pour Taïpei avec les présidents des deux Chambres, en sus d’une délégation d’au moins une vingtaine de personnes. Il mise beaucoup sur la « générosité traditionnelle » de ses hôtes pour concrétiser ses ambitions.

En effet, parti de la capitale haïtienne, dimanche, il a emporté suffisamment de linges pour un séjour prolongé, le temps nécessaire, selon lui, peut-être, pour exposer aux Taïwanais sa multitude de projets. Il s’imagine que ce sera du temps bien investi, car il n’y a pas grand-chose à faire là-bas, en Haïti, où il passe le plus clair de son temps à la pose de première pierre de projets insignifiants, ou à l’inauguration de parcs ou de balançoires.

Arrivé à Taïpei, mardi matin, le président Moïse a été accueilli par son homologue taïwanais, Tsai Ing-wen, avec une parade militaire et une revue de la Garde d’honneur. Cette première journée allait être ponctuée d’activités diplomatiques au cours desquelles ont eu lieu les rencontres d’usage et la présentation de la délégation pléthore qui accompagne le chef de l’État haïtien, quelque temps après l’emménagement à la résidence des hôtes étrangers, à capitale taïwanaise.

Un des temps forts de cette visite a été la célébration, de l’anniversaire de naissance de Martine Joseph-Moïse, la première dame d’Haïti, dans le cadre du banquet offert par le ministre des Affaires étrangères taïwanais, Joseph Wu, en l’honneur du président Moïse, auquel a participé la délégation entière.

Le lendemain, c’est le commencement des réunions de travail. Les hôtes du président Moïse sont tout oreilles, puisqu’il est question, pour les officiels taïwanais, d’entendre les « doléances » de leur ami qui sait bien que c’est le bon moment de déballer ses projets consistant en la construction physique d’Haïti
dont les dirigeants misaient toujours sur la contribution des autres pour développer leur pays et nourrir leur peuple. Qu’importe le coût, le paquet va être présenté aux Taïwanais, qui n’ont aucune intention de blesser les susceptibilités des visiteurs pour lesquels presque tous les sacrifices sont possibles, conjoncture diplomatique oblige.

Le temps de fêter l’anniversaire de la première dame 

Martine Joseph Moïse est la première citoyenne d’Haïti à fêter son anniversaire de naissance à la
mode de Taïwan. Le ministre Wu avait tout prévu à cette occasion : le gâteau d’anniversaire et une
artiste présente pour interpréter la chanson traditionnelle d’anniversaire, sous les applaudissement
du chef d’État.

Plusieurs séances de travail programmées
Sans aucun doute, Jovenel Moïse et le groupe d’officiels et d’experts qui l’ont accompagné passent
la majeure partie du temps en discussion avec les experts taïwanais, tandis que des séances de travail sont organisées avec les hommes d’affaires venus pour tirer le maximum d’avantages que peuvent offrir leurs hôtes.

Impossible de savoir ce que pensent les hôtes de Moïse, mais ce dernier a présenté une longue liste de projets dont il souhaite trouver le financement, notamment des infrastructures routières, agricoles et sanitaires. Aussi bien la construction de ponts, etc. Jovenel Moïse n’a pas négligé ses projets vedettes,
soient l’électricité 24 heures sur 24 d’un bout à l’autre d’Haïti. Aussi bien que la Caravane du   changement.

Jovenel Moïse ambitionne de trouver des ressources de Taïwan pour concrétiser tous ses projets. Il s’est montré très avare d’information concernant ses requêtes aux Taïwanais. Toutefois, après son départ d’Haïti, Wilson Laleau a indiqué que le président haïtien entend mettre l’accent « sur l’investissement et la coopération ».

De toute évidence, a considérer la longue liste de projets que M. Moïse compte exposer à ses hôtes, il y a fort à parier qu’une enveloppe de USD 3 à 4 milliards $ serait nécessaire. Quand Laleau parle de coopération et d’investissement, il n’a pas explicité les secteurs privilégiés, public ou privé. On sait que
du côté du gouvernement, les officiels taïwanais se montrent très généraux, durant ces quelque  cinquante années. Mais cette générosité se limite toujours à USD 10, 20 ou même 30 millions. Il faut déterminer aussi s’il s’agit de prêts remboursables ou de dons au peuple haïtien. Impossible de savoir, puisque, le plus souvent, les transactions réalisées entre les officiels des deux pays se font dans l’opacité totale.

S’il s’agit d’investissements du secteur privé taïwanais, Jovenel Moïse doit se garder d’avoir bon espoir d’attirer des centaines de millions, en tout cas pas de milliards. D’ailleurs, les Taïwanais ne se sont pas révélés de gros investisseurs en Haïti. Si la visite de M. Moïse à Taïwan change la réalité de l’investissement du capital privé de ce pays, on aimerait savoir quels éléments nouveaux ont contribué à rendre Haïti plus attrayant aux investisseurs taïwanais.

Si les crises qui risquent d’éclater forcent Jovenel Moïse à écourter son séjour à Taïwan, il serait alors possible de n’avoir pas bouclé sa mission. Mais s’il passe les sept jours qu’il comptait y rester comme c’était annoncé, il ne peut retourner les mains à moitié remplies. En tout cas, la nation attend que, cette fois, les Taïwanais changent leur fusil d’épaule et joue cartes sur tables pour que les accords, contrats et autres engagements pris avec les dirigeants haïtiens soient négociés sur la table et non en-dessous.
L.J.


cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti Observateur, édition du 30 mai et se trouve en P. 1, 3 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2018/05/H-O-30-mai-2018-1.pdf