Vladimir Paraison s’est Réfugié en Équateur

Vladimir Paraison s’est Réfugié en Équateur

  • TRANSPORTÉ DE MARIGOT PAR UNE VEDETTE MILITAIRE DE CE PAYS par Léo Joseph

L’ex-coordonnateur de l’Unité centrale de sécurité du Palais national d’Haïti (UCSPN) s’est dérobé au mandat d’amener qui a été décerné contre lui par le juge d’instruction de Saint Marc, dans le cadre de l’affaire de la contrebande d’armes et de munition en provenance de Miami, Floride. André Jonas Vladimir Paraison a réussi à quitter le pays grâce à un plan concocté par le pouvoir ayant instrumentalisé les bons rapports qu’il entretient avec le gouvernement équatorien pour jeter cette nouvelle pelure de banane sur la route de la justice américaine œuvrant pour remonter la filière de cette conspiration. En effet, alors que les rumeurs de la disparition de ce haut gradé de la Police nationale d’Haïti (PNH) faisaient le tour de la capitale, l’intéressé ayant choisi dix policiers qui relevaient de son commandement, monté à bord de véhicule du UCSPN se dirigeait vers Marigot (Jacmel), dans le département du sud-est. Là, apprend-on de sources autorisées, il s’était mis à couvert dans une résidence non encore identifiée, pour attendre l’arrivée du bateau qui devait y venir le chercher.

Une semaine après la rumeur de sa disparition, Vladimir Paraison était arrivé à Quito. On n’a pu savoir si aucun des dix policiers qui l’accompagnaient a pris l’exil avec lui. Sinon, cela voudrait dire qu’il s’était constitué une escorte policière en vue d’assurer sa sécurité, chemin faisant, ou bien de le protéger contre une éventuelle tentative de le capturer avant d’arriver à Marigot. Cela s’explique quand d’autres rumeurs faisaient croire que les Américains, qui travaillaient de concert avec le juge Dieunel Leumérant, dans le cadre du dossier des armes de Saint-Marc, auraient contemplé l’idée d’envoyer des marshals fédéraux pour l’arrêter eux-mêmes. Mais la tournure qu’ont prise les événements, à la faveur de la fuite de Paraison, crée une tout autre situation. Dans la mesure où le témoignage de l’ex-coordonnateur de la UCSPN est nécessaire à l’accusation, par rapport au procès, les autorités judiciaires, tant en Haïti qu’aux États-Unis, ont du pain sur la planche. Il ne s’agit pas d’une mince affaire, vu qu’il a fallu la participation des officiels Haïtiens, à plusieurs niveaux, pour favoriser le départ clandestin de ce haut gradé de la PNH.

Le limogeage de Paraison : Un stratagème pour dérouter l’enquête sur l’importation illégale des armes de Saint-Marc

La fuite de Vladimir du pays, dans les conditions que l’on sait ne fait que confirmer l’idée de l’implication des hautes autorités du pays dans un méga conspiration pour introduire des armes et munitions dans le pays en dehors des normes établies par les autorités américaines. La manière dont les dirigeants haïtiens gèrent le dossier conforte la théorie des Américains selon laquelle les personnes jusqu’ici accusées sont, pour la plupart, des «auxiliaires obligés», sinon des «associés consentants».

À l’analyse des rôles joués, les premiers ont obéi à des ordres reçus, dans le cadre de leurs responsabilités institutionnelles; tandis que les seconds ont participé à cette conspiration en connaissance de cause, en raison des avantages qu’elles leur procurent. C’est pourquoi des actes d’intimidation dirigés contre le juge instructeur de Saint-Marc, dont le premier consistant en la poursuite du véhicule de juge Dieunel Lémeurant, n’a fait l’objet d’aucune investigation. Quant au second, encore plus grave, au cours duquel des hommes armés non identifiés ont, au milieu de la nuit, criblé de balles la résidence et le véhicule de Me Lémeurant, n’a fait l’objet d’aucune intervention des autorités. Silence total ! Même attitude adoptée à l’égard du massacre de La Saline. Ce qui, de toute évidence, dans les deux cas, fait pointer du doigt l’administration Moïse-Céant comme étant l’inspiratrice de ces crimes. Surtout quand les inculpés énumérés dans le verdict définitif du juge Lémeurant sont en même temps déclarés des fugitifs. Ici encore, il y lieu d’accuser les décideurs du pays de complicité dans la fuite de ces proches du pouvoir.

Ocnam Clamé Daméus mis en cause dans le dossier des armes de Saint-Marc

S’il y a une raison de se convaincre du rôle d’obstacle à l’enquête sur l’importation illégale d’armes et de munitions des États-Unis à Haïti, en septembre 2016, il faut se référer à la manière dont le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince, Ocnam Clamé Daméus, a géré le dossier.

En effet, dans la mesure où il prend ses directives du Palais national, M. Daméus a eu une attitude nettement partisane dans la gestion du dossier des armes en question n’ayant pas suivi le protocole établi. C’est pourquoi il a délibérément omis d’exécuter l’ordre d’écrou qui avait été émis à l’encontre des personnes inculpées. En agissant ainsi, il a permis à celles-ci de s’évader dans la nature. Désormais, à moins qu’elles se rendent volontairement, Réginald Delva, André Jonas Vladimir Paraison, Ronald Nelson, Jimy Joseph Junior Joël Joseph, Monplaisir Édouard, et Durand Charles sont recherchés par la Police nationale et l’Interpol.

Il est un fait certain qu’en Haïti le commissaire du gouvernement, qui obéit aveuglément aux mots d’ordre de l’exécutif, n’aurait pris la liberté de passer outre à faire exécuter l’ordre d’arrestation des accusés de son propre chef. On en veut pour preuve les décisions qu’a prises Ocnam Clamé Daméus de décerner des interdictions de départs, ou d’émettre des convocations à l’encontre de certaines personnes épinglées dans le dossier Petro Caribe, tels que l’ex-premier ministre Laurent Salvador Lamothe. Pourtant, les principaux concernés comme Michel Martels ne sont pas le moins du monde inquiétés. C’est le procédé établi par le Palais national pour donner l’impression que la présidence mobilise les ressources des institutions étatiques pour gérer l’affaire PetroCaribe dans le sens des revendications des PetroCaribe challengers.

Dans le dossier des armes de Saint-Marc, l’attitude de Jovenel Moïse et son équipe ne diffèrent en rien la manière dont ils gèrent le scandale PetroCaribe, faisant flèche de tout bois pour détourner les démarches du mouvement PetroCaribe dont le principal objectif consiste à poursuivre en justice les personnes accusées de vol dans les rapports des deux enquêtes du Sénat pilotées par les sénateurs Youri Latortue et Évalière Beauplan. Dans le même ordre d’idées, Ocnam Clamé Daméus, obéissant strictement aux exigences du président Moïse, a tout bonnement ignoré l’ordre d’arrestation des conspirateurs dans l’affaire d’importation illégale d’armes et de munitions de Miami, en Floride, au port de Saint-Marc, en Haïti.

À la lumière de tous ces scandales à rebondissements, qui éclatent presque au jour le jour, impliquant les gouvernements Martelly-Lamothe, Martelly-Paul et Moïse-Lafontant, on peut encore mieux comprendre les raisons pour lesquelles Sweet Mickey avait jeté son dévolu sur Jovenel Moïse pour le succéder.

Dans la gestion du pouvoir, ce dernier se révèle bien le digne héritier de son prédécesseur et mentor en imitant religieusement la conduite ses actes et décisions.

Un comportement d’État voyou

Déjà connus pour un président criminel, pour avoir prêté serment pendant qu’il se trouvait sous le coup d’une inculpation pour blanchiment d’argent, Jovenel Moïse et son équipe mettent Haïti au rang d’États voyous. C’est la conclusion à laquelle il faut aboutir quand on sait que, dans la mesure où l’importation illégale d’armes et de munitions, dans les conditions que celles-ci sont distribuées en Haïti, les dirigeants haïtiens favorisent l’épanouissement du terrorisme international. Puisque des en quêtes ont révélé que des armes provenant d’Haïti, dont certaines appartenant à la Police nationale, ont été retrouvées en République dominicaine, à la Jamaïque, au Venezuela, ou encore au Mexique entre les mains des caïds de la drogue.

En clair, les faits prouvent clairement que l’administration Moïse-Céant joue le rôle de promotrice du terrorisme international et fait d’Haïti une source d’approvisionnement d’armes et de munitions aux agents de terreur de l’hémisphère occidental. C’est pourquoi, dans certains milieux diplomatiques, à la capitale haïtienne, on lui décerne l’appellation État voyou. Puisque les autorités optent pour ne pas participer à la politique régionale visant à protéger les pays de la région contre les terroristes.

On peut comprendre pour quoi les Américains poursuivent ce cas avec tant d’acharnement pour que soient identifiées les personnes derrière cette conspiration fomentée par Jimy Joseph, qui s’était déclaré, à l’origine, le responsable de la société « Global Dynasty Corps S.A. », soi-disant immatriculée en Haïti; et la compagnie « Global Dynasty Corps LLP » basée à Orlando, Florida, et dont le propriétaire est Junior Joël Joseph, frère de Jimy. Rappelons que les autorités judiciaires américaines suivaient les différentes phases de l’acquisition illégale des armes et munitions destinées au port de Saint-Marc, grâce à un informateur qu’elles avaient planté au sein du « marchand » d’armes Junior Joël Joseph et de l’« acheteur » Jimy Joseph.

En clair, les autorités fédérales, par le truchement de leur informateur, assuraient l’instruction du dossier, avant même la commission du crime, de manière à connaître l’identité des personnes interposées agissant pour le compte de grosses légumes du pouvoir, les vrais responsables de cette importation illégale. Nonobstant les rôles attribués aux personnes inculpées par le juge instructeur de Saint-Marc, Dieunel Lémeurant, les autorités judiciaires américaines mettent tout en œuvre pour connaître les vrais importateurs des armes et munitions introduites illégalement dans le pays, en septembre 2016.

Qu’en est-il des mercenaires qui ont été intégrés à la UCSPG?

La fuite de Vladimir Paraison en Équateur amène à se demander qu’en est-il des mercenaires étrangers introduits dans les rangs de la UCSPG, des francs-tireurs appelés surtout à renforcer la défense du Palais national et à faire échec à toute velléité des manifestants de foncer sur la résidence officielle du chef de l’État. Dans la mesure où les dirigeants haïtiens n’ont jamais expliqué ni l’origine de ces étrangers portant un uniforme différent de ceux de la PNH et des brigades spéciales, et dont le directeur général de l’institution avait déclaré ignorer totalement l’origine, ni leur mission, encore moins la durée de leur déploiement en Haïti, il ne reste plus aux observateurs qu’à donner dans les conjectures.

En effet, puisqu’on ne voit plus ni entend parler de ces mercenaires, en Haïti, il faudrait se demander s’ils n’étaient pas des Équatoriens venus en Haïti à l’initiative de Paraison. Car, ayant fait ses études à une académie militaire d’Équateur, on laissait croire qu’il possède des amis au niveau de la hiérarchie militaire et policière de ce pays. Ces derniers, raisonne-t-on, auraient tout bonnement influencé la décision d’expédier des gens armés en Haïti, à la requête du fugitif.

Dès l’instant où Paraison s’était retrouvé dans l’obligation de quitter le pays en toute urgence, il semble que les mercenaires aient reçu l’ordre de leurs supérieurs, à Quito, de regagner leur pays. Dans ce cas, la vedette militaire expédiée à Marigot pour chercher le haut gradé de la PNH en fuite aurait pu faire d’une pierre deux coups : amener Paraison en Équateur et rapatrier les mercenaires dont le service était prêté au gouvernement Moïse-Céant. Tout compte fait, la manière dont les dirigeants haïtiens traitent ce dossier montre que l’administration Moïse-Céant fait tout en son pouvoir pour déjouer l’enquête, de manière à éviter que l’identité de Michel Martelly, de Laurent Lamothe et consort ne soit révélée avec toutes les conséquences que cela peut entraîner pour les présents dirigeants, mais encore surtout pour le prédécesseur de Moïse et ses alliés politiques. L.J.


cet article est publié par l’hebdomadaire Haïti-Observateur, édition du 12 décembre 2018 et se trouve en P.1, 2, 3 à : http://haiti-observateur.ca/wp-content/uploads/2018/12/H-O-12-december-2018-2.pdf